Revue de Presse

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La grotte du Pertuis, Champs d'expérimentation pour la médecine souterraine

Yonne Sud, édition du samedi 19 décembre 1987.

Mailly-le-Château. - Le Comité départemental de spéléologie, association regroupant une cinquantaine de membres représentant l'ensemble des spéléos de L´Yonne, a organisé une journée d'initiation et d'information, à l'intention de quelques médecins volontaires. Son but : sensibiliser les généralistes aux conditions très particulières imposées_par le milieu souterrain, tant sur le plan physique que « psychique », aux mordus de la descente aux enfers. Quels soins apporter à un blessé sous terre ? Comment l'évacuer après médicalisation ? Autant de questions auxquelles ont été confrontés les volontaires du jour, dans la grotte de Pertuis, à Mailly-le-Château.

L´organisation de cette journée est revenue â la commission de secours du Comité départemental de spéléologie. En mai et juin derniers, elle avait déjà animé un stage secours aux falaises du Saussois pour former des chefs d'équipe et des équipes de secours.

Dans L´Yonne, une vingtaine de personnes ont été formées de façon à être opérationnelles immédiatement en cas de coup dur chez des spéléos en exploration. Cette équipe de pros dépend de l'autorité du préfet, qui nomme d'ailleurs le conseiller technique départemental chargé d'assurer l'encadrement de cette équipe de secours.

Un tel organisme s'avère de plus en plus nécessaire, étant donné le nombre croissant des pratiquants dans le département, mais surtout en raison du nombre important de cavités visitées par des spéléos de tous horizons.

De la théorie...

Jusqu'à présent, lors d'interventions dans ce milieu particulier qu'est le monde souterrain, l'à-côté médical avait été un peu laissé de côté. Les relations spéléologie - médecine sont récentes ; le premier stage effectué avec des médecins a été réalisé en 1986, dans l'Isère Nous serons les seconds sur la liste à avoir mis en place ce type d'opération, explique Janine Galice, un chef d´équipe tonnerroise qui a participe à cette journée de sensibilisation.

Journée dont le programme s´est étalé du débat théorique à la mise en situation pratique des problèmes rencontrés sous terre par des spéléos et des médecins ayant affaire à un blessé. Des médecins, rares spécialistes en spéléologie sur le plan national, le docteur Dusein et Nicole Nguiyen Ngoc, avaient fait spécialement le déplacement depuis Paris pour convaincre leurs collègues. Tous deux sont membres de la commission médicale de la Fédération française de spéléologie et connaissent le problème de la « spèlèo-médecine » à fond. Alain Guillon. conseiller technique départemental, est intervenu pour parler des conditions propres à la spéléologie dans L´Yonne. De ce cours théorique, deux aspects concrets peuvent être retenus : le souci de la prévention, la médicalisation sur place. La prévention, c'est l'alimentation du spéléologue, d'où I´importance insoupçonnée de la diététique. La prévention, c'est encore les techniques de musculation, l'acquisition des gestes, l'épuisement à surveiller car on fatigue plus vite sous terre qu'en surface. Dans L´Yonne, nous avons souhaité que les médecins participent afin de les informer et qu'ils puissent ensuite demander à suivre une formation spécifique, commente Janine Galice.

... à la pratique

Après la salle de cours, le grotte du Pertuis, dont les prolongements ont été découverts récemment par le Spèléo-Club de Chablis. En situation, les médecins de Joigny, Auxerre, Aillant-sur-Tholon ont réalisé sur le vif les difficultés d'interventions médicalisées sous terre. Avant, on cherchait a sortir le plus rapidement possible le blessé. Tant bien que mal ! Aujourd'hui, on commence par le médicaliser sur place afin qu'il regagne la surface le mieux possible et avec le moins de risques. Comment passer une étroiture avec un blessé sous perfusion ? Comment lui permettre d'être alimenté en air lorsqu'il est enserré dans un container? Pour éviter le refroidissement du liquide de perfusion, on a pu apprendre qu'en enroulant le tube autour de notre bouteille d'acétylène, celui-ci était réchauffé par le contact. Une chatière, un puits, le blessé doit pouvoir le franchir sans dommage. C'est pourquoi l'urgence n'est plus l'évacuation mais la médicalisation avant évacuation.

Avoir des médecins pratiquant la spéléo devient nécessaire et ceux qui ne peuvent pas ou ne veulent pas pratiquer doivent être au moins sensibilisés au problème. D'où l'intérêt de cette journée sur le tas pour les quelques médecins qui avaient répondu présents à l'appel lancé par les spéléologues de L´Yonne.

Ils nous ont posé beaucoup de questions techniques et ont été convaincus de la nécessité de la présence d'un médecin dans une intervention de secours. D'ailleurs, certains d'entre eux ont déjà participer au prochain exercice.

Y. HALOPEAU.

Article mis en ligne le : 16 avril 2008